Guerre contre les 2RM

Par Lorin Voutat, membre du comité

Depuis fin octobre 2021, tant la Ville de Genève que l’État ont décidé de lancer une guerre sans pitié contre les détenteurs de deux roues motorisés (2RM). Ceci, sans qu’aucune concertation avec les milieux concernés pour trouver une solution à l’amiable convenant à tous n’ait été étudiée.
Sachant qu’au 30 septembre 2021, il y avait 60’263 immatriculations de véhicules 2RM), on peut très aisément imaginer que le nombre de places disponibles pour ceux-ci n’est de loin pas suffisant. Monsieur Leibzig, Directeur Général de l’Office cantonal des véhicules à Genève, nous informe qu’en dix ans, le parc a augmenté de plus de 20%. Il nous explique qu’il n’y a pas de lien entre le fait de payer un impôt sur la plaque et le droit de disposer d’une place pour se garer.

Pourtant, avec un minimum de bon sens, des places pourraient être créées et ce, même sans gêner les piétons ce qui semble normal. Monsieur Leibzig nous précise que les vélos électriques peuvent sans autre se garer sur les trottoirs. Quand on constate la place prise par les vélos cargo par exemple, on peine à comprendre la logique. Selon Monsieur le Conseiller d’Etat, Serge Dal Busco, cela devrait faire l’objet d’un débat national.

La situation à Genève n’était plus tolérable pour notre Président de la République qui se prévaut également d’une volonté du Procureur Général, Olivier Jornod, pour justifier cette sévérité soudaine. Pour notre Conseiller d’Etat en charge du Département des Infrastructures et donc de la Mobilité, il n’y a pas de politique répressive menée contre les 2RM. On peut en douter au vu du nombre de papillons déposés par les agents verbalisateurs sur les guidons des 2 roues mal garées. Monsieur Dal Busco précise que de nombreuses places de stationnement ont été créées (4’000) en surface et en ouvrage. Ce qui devrait donc permettre à tous de se garer sans être en infraction. Cela nous est confirmé par Mme Emmanuelle Merle, Directrice marketing de la Fondation des Parkings (FdP). Elle explique que la FdP offre depuis quelques temps de nombreuses places en sous-sol pour les 2RM, ceci à des prix défiant toute concurrence. Mais de nombreux conducteurs trouvent ses solutions peu attrayantes, voire dangereuses, spécialement quand le sol de ces parkings est mouillé, car il n’est pas forcément adapté au déplacement en sécurité des 2RM.

On peut effectivement louer cette solution pour les personnes qui n’effectuent qu’un aller-retour de chez elles à leur bureau, mais celle-ci n’est de loin pas adaptée à toutes celles qui utilisent leur 2RM pour se déplacer rapidement et efficacement quotidiennement à de nombreuses reprises.

Après la pandémie et les traces laissées par la COVID sur le commerce genevois, le moment est-il opportun de sanctionner plus encore les commerçants en les privant de nombreux consommateurs ? A croire la position de M. Yves Grange, patron des excellents restaurants « Chez Gigi » et « La Micheline » à la gare des Eaux-Vives, ce n’est pas le bon moment. Ses clients se plaignent avec véhémence d’être amendés devant les restaurants, sur l’esplanade, alors qu’ils ne gênent personne ! Certains ont clairement annoncés qu’ils renonceraient à s’y rendre, si aucune place ne leur est accordée. Yves Grange, également patron de la Régie Grange & Cie, constate également que cela devient problématique pour ses collaborateurs de se déplacer au centre-ville de Genève en 2RM sans se faire amender.

On ne peut que regretter aussi que la plus grande des associations de 2RM n’ait pas été écoutée lors des rencontres qui commencent à dater, puisqu’elle était totalement contre la mise en place de cette politique avant que l’Etat ne propose des solutions satisfaisantes.

La situation est devenue inacceptable pour toutes les personnes qui utilisent ce moyen de transport qui est, bien souvent, le seul efficace. Même la CCIG pend le problème très au sérieux puisqu’elle soutient largement la pétition lancée par Maxime Provini, conseiller municipal PLR en Ville de Genève. L’accès en Ville de Genève est important pour tout un pan de l’économie.

On peut parfaitement comprendre la position de M. Dal Busco souhaitant libérer les trottoirs pour faciliter le cheminement des passants et des personnes handicapées. Mais l’argument est infondé, puisque les 2RM n’entravent que très rarement la circulation de ceux-ci. Et, si tel est le cas, il est normal de prendre les mesures nécessaires pour rétablir l’ordre.

En Ville de Genève, de nombreuses places de parking attribuées aux 2RM sont squattées par des épaves de vélo. La magistrate en charge de la Voirie, Marie Barbey-Chappuis ne semble pas s’émouvoir de la lenteur de ses services pour rendre aux 2RM les places qui leur reviennent. Une bonne solution pour remplir les caisses de la Ville ? Les commerçants apprécieront à sa juste valeur le soutien des autorités pour faciliter l’accès à leur commerce.

Nous pensons que tant l’État que la Ville devraient ouvrir un dialogue constructif avec toutes les parties concernées, afin de trouver une solution qui convienne au plus grand nombre. Surtout que, d’après nos informations, le combat mené par nos deux conseillers municipaux à Berne, Vincent Maître et Christian Luscher semble porter ses fruits… Les 2RM pourraient à nouveau stationner sur les trottoirs en respectant les règles. Affaire à suivre.

L.V.